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Entretien avec...Me Jacqueline Moudeïna, avocate des victimes de l’ex-numéro 1 tchadien : «On aurait voulu que Aminata Touré reste au cœur du dossier Habré»

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La coordonnatrice du collectif des avocats des victimes de Hissène Habré, Me Jacqueline Moudeïna, s’est confiée au journal Le Quotidien, pour regretter le départ de Aminata Touré «Mimi» de la tête du ministère de la Justice, relativement au rôle qu’elle a joué dans la signature d’un accord de coopération judiciaire entre le Sénégal et le Tchad.

Me Jacqueline Moudeïna s’est également exprimée à propos des querelles entre responsables des différentes associations des victimes, tout en affirmant que c’est un faux problème.

(Envoyée spéciale à Ndjamena) - La commission rogatoire internationale vient de boucler la première mission ici à Ndjamena. Etes-vous satisfaite de la première manche ?
Pour ce qui est de la commission rogatoire internationale, satisfaite ou pas, nos remarques, nous les adressons directement à la commission d’instruction. C’est une procédure d’instruction et s’il y a des remarques à faire, nous les adresserons directement à la commission. Ce n’est pas la seule commission rogatoire. Il y en aura d’autres. Il est prévu trois commissions rogatoires. Nous espérons que ces trois commissions rogatoires vont se dérouler comme le prévoit le statut des Chambres africaines extraordinaires. Et s’il y a des problèmes à résoudre, nous les soumettrons aux juges qui pourront, en toute indépendance, prendre une décision qui arrangerait tout le monde.


Mais n’y a-t-il pas de petits couacs, dont vous voudrez que la commission rectifie, lors des prochaines missions ?
J’ai dit, s’il y a des remarques à faire, nous les ferons directement à la commission. Je ne vais pas le dévoiler ici. Il y aura certainement des remarques à faire. 
Dimanche dernier, les présidentes des différentes associations et le collectif des avocats des victimes ont été les invités d’une émission à la radio Liberté. Vous vous êtes notamment expliqués sur les différends qui vous opposent. Maintenant, quelles sont les perspectives ?
Je trouve que c’est un faut problème. Parce que ce qui fera juger Habré, ce ne sont pas les querelles d’associations, ni les querelles d’hommes. Aujourd’hui, nous sommes allés très loin. Nous sommes arrivés à un point de non retour. Avant, on s’inquiétait parce qu’il n’y avait pas de système pour juger Hissène Habré. Aujourd’hui, tout le système est mis en place. Et le travail a commencé. Le début de la procédure que nous attendons depuis 13 ans est devenu une réalité. Maintenant, ce qu’il y a lieu de faire, c’est de travailler simplement pour produire beaucoup de preuves et des preuves probantes, qui pourront amener les juges d’instruction à renvoyer ce dossier devant les juridictions de jugement. Une procédure a été enclenchée. Ceux qui étaient en dehors de cette procédure, parce qu’ils n’y croyaient pas ou ils n’avaient pas la patience de travailler pendant 13 ans, n’ont qu’à se joindre à la procédure. Elle est unique. Je ne vois pas comment quelqu’un peut s’amuser à parler de sa procédure. S’il y a des avocats commis pour des retardataires, ces avocats se joindront à nous. Je ne suis pas d’une association de victimes. Je dirige une association de droit de l’Homme, qui est l’initiatrice de cette procédure et je suis avocate des victimes. Donc, je ne me mêle pas des querelles des associations des victimes.
Vous dites que vous ne vous en mêlez pas, mais dimanche lors de ce débat, un des responsables d’une association vous a publiquement accusée d’avoir cassé l’association…
Vous savez, un type qui est en désarroi, il agit toujours de la sorte. Le président de l’Association des victimes des crimes de Hissène Habré (Avcrhh), Clément Abaifouta, a eu à expliquer l’historique. C’est parce qu’il y a eu du faux, organisé à l’époque par ceux qui dirigeaient l’association. (Ndlr : Ismaël Hachim aujourd’hui décédé et Zakaria Fadoul Kitir, l’actuel président de l’Avcrp, l’association mère). Les victimes ont voulu régler ce problème par une Assemblée générale. Les autres ne voulaient pas que cette assemblée se tienne. Et c’est l’actuel président de l’Avcrp, Zakaria Fadoul, qui s’est interféré pour interdire Hachim d’être présent à cette rencontre. Cette assemblée s’est quand même tenue, les victimes ont désigné Clément Abaifouta comme président de leur association. Eux (Ndrl : Zakaria et Hachim) n’étaient pas contents de voir Abaifouta à la tête de l’association. Ils ont tout arraché. Abaifouta a même été emprisonné à cause de cette histoire. Et après, il était obligé de créer sa propre association. Je n’ai rien à voir à cela. Ce n’est pas moi qui ai créé des associations des victimes d’autant plus que j’ai la mienne qui est une association des droits de l’Homme.
Le problème aujourd’hui, c’est qu’il faut accabler quelqu’un. Et c’est moi. Parce que je fais un travail qui n’arrange pas tout le monde au Tchad. Et il n’y a pas que lui qui me mette des bâtons dans les roues.
Qui sont ces personnes ?
Je ne les citerai pas. Mais certaines personnes sont allées dire au Président Idriss Deby que je ne travaille qu’avec les gens du sud parce que moi je suis ressortissante du sud du Tchad. Ce qui est complètement faux. Je crois qu’il n’y a peut-être que 10 ou 20 personnes du sud. Le reste, c’est des gens du nord. C’est une guerre qu’on me fait. Mais moi je ne prête pas attention à cette guerre-là. Les gens n’ont pas d’arguments. Ils veulent tout simplement bloquer le dossier. Mes arguments sont au-dessus de ces querelles. Je ne m’en occupe pas.
Pour la suite, vous souhaitez que les gens accordent leurs violons pour vous faciliter un peu la tâche…
De toutes les façons, quand on est victime, on n’a pas besoin de se faire guider. La victime a juste besoin d’être dans un système où les gens peuvent réellement s’occuper d’elle. Si elle sait que son intérêt c’est là où les gens travaillent réellement, là où les gens ont des preuves pour accabler Hissène Habré, c’est là-bas qu’il faut aller se faire enregistrer. Ce ne sont pas les organisations qui se présenteront devant Hissène Habré. Je regrette. Ce sont des personnes et ces personnes vont être sélectionnées à partir de l’importance du témoignage qu’elles apportent pour pouvoir étayer ce qui a été déjà fait. 
Quel est maintenant votre programme en attendant l’arrivée de la prochaine mission ?
Nous allons continuer le travail que nous avons toujours fait : le travail de recherche. Nous allons continuer pour étoffer le dossier. Hissène Habré, sous son règne, a fait perpétrer des massacres dans tout le Tchad. Ce n’est pas seulement à un seul endroit. Pour faire un travail complet, nous avons besoin de sillonner tout le Tchad. Nous allons continuer la recherche et la collecte. Nous avons beaucoup de témoignages, de déclarations et de preuves que nous avons recueillis pendant 13 ans. Et jusqu’à aujourd’hui, il y a des preuves qui sortent que nous estimons très importantes à ajouter dans le dossier. 
Le ministre de la Justice, Aminata Touré, vient d’être nommé Premier ministre du Sénégal. C’est elle qui a représenté la partie sénégalaise dans la coopération entre le Tchad et le Sénégal pour la tenue du procès Hissène Habré. N’avez-vous pas aujourd’hui quelques soucis par rapport à la suite de ce dossier ?
On aurait voulu qu’elle soit la personne qui reste au cœur de ce dossier jusqu’à la fin. C’est elle qui a été désignée par le Sénégal pour signer l’accord de coopération judiciaire avec le Tchad. Elle s’est aussi imprégnée de ce dossier. On aurait voulu que ce soit la personne qui accompagne ce dossier jusqu’au bout surtout sur le plan administratif, sur le plan étatique. Mais bon, je crois que le Président sénégalais a ses raisons. Je pense aussi que Macky Sall a été élu d’abord par les Sénégalais pour résoudre leurs problèmes. Il n’a pas été élu pour le dossier Habré, donc c’est tout à fait normal qu’il aménage son gouvernement pour pouvoir répondre aux préoccupations des Sénégalais.
Etes-vous confiante pour la suite du dossier ?
On s’est fait une raison pour pouvoir rester sur ce dossier depuis longtemps. Nous nous battrons pour que le dossier aboutisse. Nous ne connaissons pas les gens qui sont là. Nous ne savons pas leur vraie capacité pour faire avancer ce dossier. Donc, nous ne pouvons pas nous prononcer. Mais de notre côté nous n’allons pas baisser les bras. Nous allons toujours continuer à travailler pour que ce procès puisse avoir lieu.

 

 

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