Seulement neuf femmes sur vingt-huit commissaires à la tête de l’Union Européenne (UE). Avec ce tiers laborieux, la nouvelle Commission européenne n’est pas égalitaire, pour sûr. Mais la catastrophe a été évitée de justesse : il y a encore une semaine, elles n’étaient que quatre à avoir été présentées parmi tous les candidats des pays membres. Il a fallu que le Parlement européen menace de ne pas valider la nouvelle Commission lors du vote d’investiture et que Jean-Claude Juncker, futur président de la Commission européenne, implore les chefs d’Etat pour obtenir des efforts. Les meubles sont sauvés : neuf femmes, c’est autant que la précédente Commission. On ne régresse… ni ne progresse. C’est la conclusion que tire l’eurodéputée Sylvie Goulard, membre de l’Alliance des démocrates et libéraux en Europe (ALDE), symbole à elle seule de la pertinence des femmes en politique. Désignée meilleure eurodéputée française par le journalL’Opinion, l’ancienne conseillère politique de Romano Prodi ne cesse d’œuvrer pour que l’Europe ne soit plus perçue comme cette lourde nébuleuse institutionnelle. Très loin du règne des têtes vieilles et blanches.
LeFigaro.fr/madame.– Trouvez-vous la nouvelle Commission « équilibrée » ?
Sylvie Goulard. – Il me semble qu’avec la parité, si les mots ont un sens, il y aurait dû avoir 14 femmes… Elles sont neuf. En 2014, ça paraît peu tout de même. Quelques jours plus tôt, elles n’étaient que quatre, c’était indécent ! Neuf, c’est le même nombre que dans la précédente Commission, il n’y a eu aucun progrès.
Pourquoi si peu de femmes ?
Il faut déjà dénoncer cet argument ridicule qui avance qu’il n’y a « pas assez de femmes compétentes ». Le média Europolitics a publié une liste de 70 femmes compétentes au sein des 28 pays membres, qui auraient pu être nommées. Le problème est que nous sommes toujours dans un système de cooptation d’hommes politiques nationaux. Les chefs d’Etat pensent qu’il ne faut désigner que des anciens ministres. On auto-restreint le vivier possible de commissaires en puisant toujours dans ces cercles nationaux où les hommes dominent. Nous avons un vrai problème d’ouverture à la modernité : aucun pays n’a désigné quelqu’un issu de l’immigration pour candidat. Pourtant cela aurait eu une certaine allure de mettre en avant des gens différents, surtout après les dernières élections européennes. La commission ne ressemble pas à la population.
Il n’existe aucun critère contraignant pour choisir le candidat de chaque pays…
Non. Le chef d’Etat choisit son commissaire seul, de façon aléatoire, sans consulter les autres membres. Les pays qui s’honorent d’être « de grands pays pour l’Europe », comme l’Allemagne ou la France, ne font pas en fonction de la parité. Ils considèrent que c’est aux autres de s’en charger ! C’est très révélateur du manque d’esprit d’équipe dont souffre l’Union européenne. Pourtant, ces mêmes pays ont adopté des lois sur desquotas de femmes en entreprise. On a l’impression d’une classe politique qui impose aux autres des principes qu’elle ne veut pas s’appliquer à elle-même.
Source: Le Figaro
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