HuffPost Maghreb: Racontez-nous votre passé de militante féministe
Saïda Rached: Durant mes études de médecine, j’avais une activité politique de trotskiste. Ayant toujours eu une sensibilité féministe, j’ai donc intégré un club culturel dénommé "Tahar Haddad". Nous discutions à l’époque des droits des femmes, en dehors du féminisme d’Etat érigé par Bourguiba. Ce club fut le point de départ du mouvement féministe en Tunisie.
Quel est le bilan de vos actions depuis la révolution?
En 2011, nous avons obtenu du gouvernement de Béji Caïd Essebsi la parité sur les listes électorales. Nous exigeons maintenant qu’elle soit inscrite dans la future Constitution.
En 2012, nous avons organisé une grande mobilisation contre l’introduction de la notion de complémentarité dans la Constitution.
Depuis l’arrivée d’Ennahdha au pouvoir, on vit un cauchemar. Même si aucune des lois acquises pour les droits des femmes n’a été touchée, dans la vie de tous les jours, il y a des libertés acquises qui sont menacées. En réalité, nous avons pris du retard au lieu d’avancer.
Quelles seront vos premières actions?
L’espace public tunisien continue à être masculinisé. Nous travaillons donc pour la participation des femmes à la vie politique, qui constitue aujourd’hui un impératif majeur pour la réalisation de la démocratie et la consolidation de l’égalité.
Nous allons nous mobiliser massivement pour l’institutionnalisation des droits des femmes. Formuler le principe de l'égalité entre les hommes et les femmes dans tous ses aspects dans la Constitution. Elle devra préciser que les hommes et les femmes sont égaux et ont droit à la pleine égalité en droit et en pratique, ainsi qu’à l'égalité des chances.
Certaines personnes accusent l'ATFD d’être anti-islamiste, cela vous empêche-t-il de travailler sur le terrain?
Ce n’est pas évident tous les jours. Actuellement, notre association et nos militantes subissent une campagne de diffamation de la part des islamistes, et ce dans un contexte marqué par l’indifférence et l’impunité.
La violence est désormais utilisée afin de mieux dominer les femmes et les amener à quitter le champ politique et public. Les islamistes ont un modèle de société que nous, féministes, ne partageons pas. Nos actions ont pour but l’égalité entre les sexes, la démocratie et la justice sociale.
Les droits des femmes sont-ils vraiment menacés en Tunisie?
Aujourd’hui, on se bat vraiment pour que cette Constitution soit conforme à nos attentes en matière de non discrimination et d’égalité.
Nous voulons que la Convention internationale contre toutes les formes de discrimination à l’égard de la femme (CEDAW) soit inscrite dans la prochaine Constitution.
Certes, il y a des menaces, mais il y a aussi beaucoup de mobilisation pour y faire face.
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