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Entretien avec Jeannette Bougrab: Femme de conviction, conviction qui dérange

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L'ancienne secrétaire d'État à la Jeunesse et à la Vie associative sous Nicolas Sarkozy profite de sa liberté de parole pour poursuivre la lutte contre les inégalités entre hommes et femmes.

Avocate au sein du cabinet Mayer Brown, à Paris, la Castelroussine fait partie de ces femmes politiques qui, à force de prises de position, s'attirent la foudre des adversaires ou amis. Pour Les Oubliés de l'Actu, elle n'en démord pas et continue à cibler l'impuissance politique sur certains sujets délicats.

"Une femme meurt tous les jours de coups portés par son conjoint". D'emblée, Jeannette Bougrab plante le décor constatant la longueur du chemin à parcourir sur les violences envers les femmes. Cible privilégiée de moult critiques, la native de Châteauroux, dans l'Indre, n'a pas peur des mots. Elle est féministe et l'assume. "Quand on est issue d'une famille comme la mienne avec une mère mariée à l'âge de 13 ans, c'est normal, estime l'avocate, j'ai envie de redonner ce que j'ai reçu et de me battre pour les autres".

"En France, on ne parle pas de femmes comme Malala par peur de stigmatiser l'islam "

Femme de poigne, elle n'hésite pas à prendre position sur des sujets très délicats. À bientôt quarante ans, Jeannette Bougrab se retrouve éloignée de la vie politique, un milieu qu'elle a côtoyé durant la présidence de Nicolas Sarkozy de 2007 à 2012. Elle avait notamment subi une lourde défaite lors des élections législatives législatives des 10 et 17 juin 2007 dans la 18e circonscription de Paris ne récoltant que 36,71% des voix au second tour face au socialisteChristophe Caresche.

Ancienne présidente de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, plus connue sous le nom de Halde, elle a surtout pris la tête du secrétariat d'État à la Jeunesse et à la Vie associative dès novembre 2010. Rapidement taxée de "caution arabe du gouvernement Fillon", la Castelroussine n'a jamais eu le loisir d'apprécier le tapis rouge. Fille de harkis, elle garde en tête le fait que la France a enfin "fait reconnaître l'abandon des harkis. C'était reconnaître la souffrance, la violence et l'injustice vécues par des gens comme mon père". Mais son combat principal demeure la lutte contre les inégalités entre hommes et femmes que ce soit dans l'Hexagone ou à l'étranger.

"Sachez que pendant cette interview, deux femmes vont mourir en Afghanistan car on leur refuse l'accès à un médecin, informe l'ex-politicienne, ce n'est pas une question propre à tel ou tel État, c'est quelque chose de commun à l'ensemble des sociétés occidentales ou orientale". Pour donner du volume à ce qu'elle évoque, Jeannette Bougrab prend pour exemple l'histoire de Malala au Pakistan. "Times l'a mis à la Une parmi les 100 personnalités les plus influentes du monde, relaie-t-elle, en France, nous avons toujours eu peur d'en parler de peur de stigmatiser l'islam. Quand cette gamine se prend une balle dans la tête car elle lutte pour avoir accès à l'école et que l'on voit ce manque de considération chez nous, c'est dur".

Malala à la Une de Times

Elle tient à rappeler qu'au même moment que la Une de Times,"Le Nouvel Obs' faisait sa Une sur le plaisir féminin. Sans doute, les Français pensent que nous avons déjà beaucoup fait pour les femmes et que maintenant elles doivent se taire".

Rappelant que les femmes "sont les premières victimes du radicalisme", elle regrette la difficulté éprouvée à l'heure d'aborder ces sujets. "Cela fait plus de 10 ans que j'en parle, rappelle-t-elle, j'avais rendu un avis sur les droits civiques des femmes immigrées. Parler d'excision, ce n'est pas dénoncer une culture, c'est juste dire qu'il existe des principes non négociables comme l'intégrité du corps humain ou la dignité de la femme".

"Le Printemps arabe a dégradé la situation de la femme"

L'avocate avait demandé à Moubarak de partir quand elle était ministre. Célèbre pour avoir dit que Hosni Moubarak devait partir, elle dénonce le bilan du Printemps arabe qui a, en réalité, "contribué à dégrader la situation de la femme dans les pays concernés. Je suis celle qui avait dit qu'il n'existait pas d'islamisme modéré après les élections législatives en Égypte. Quand on voit la situation des Égyptiennes, aucune amélioration ne peut être constatée". Mais Jeannette Bougrab va plus loin. Selon elle, "les Frères musulmans et Ennahda, en Tunisie, ont volé la révolution au peuple, un mouvement qui était très attaché à la liberté. Et comme il y a des complicités de la part de certaines chancelleries ayant soutenu ces despotes, plus rien ne s'est passé par la suite".

Ainsi, la quadragénaire rappelle qu'en "Tunisie, une femme a récemment été violée par trois policiers. Ces derniers ont été certes condamnés mais la femme aussi... Les victimes de viol se retrouvent elles-mêmes accusées et cette jeune femme a été obligée de fuir le pays. Un exemple issu d'une longue série d'histoires qui suscitent l'indifférence des gouvernements occidentaux". En Inde, "la récurrence, c'est que quand vous naissez femme, vous naissez sous une forme de malédiction. Dans certains villages de ce pays, censé être une grande démocratie, les sœurs des personnes condamnées se font violer comme châtiment. En termes de droit aux femmes, ce n'est pas encore ça".

"Les femmes françaises se sont endormies sur leurs lauriers". Féministe, elle n'apprécie que très peu l'image des Femen. Très remontée par une indifférence coupable dans la société, Jeannette Bougrab avoue sa déception à l'égard des femmes françaises qui "se sont un peu endormies sur leurs lauriers en pensant que désormais tout allait bien alors que la situation se dégrade. Il y a toujours 30% d'écart sur les salaires entre les hommes et les femmes, ces dernières subissent toujours le temps partiel sans oublier les violences...Tout reste à faire". Quand elle était présidente de la Halde, cette fille de harkis a été surprise que "les syndicats ne se préoccupaient pas le moins du monde de la condition des femmes. Les Femen, si elles étaient allées devant la mosquée un vendredi à 13 heures j'aurais dit chapeau!".


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