Alors que le monde du privé multiplie les réseaux et clubs de femmes en tout genre, les femmes politiques manquaient jusque-là d’un réseau à elles. C’est en faisant ce constat que l’idée du forum Femmes et pouvoir est venue à Julia Mouzon. L’idée : rassembler les femmes exerçant des responsabilités politiques, qui connaissent les mêmes difficultés de parcours et les mêmes expériences, afin d’échanger et de trouver des solutions pour avancer vers la parité. Comment s’imposer dans un monde encore très majoritairement masculin ? Comment faire face aux critiques et remarques sexistes subies fréquemment ? Élues, conseillères générales ou régionales, députées, ministres, maires, députées européennes : elles sont venues de toute la France pour construire ensemble des solutions et faire progresser l’égalité hommes-femmes. Et cela, au-delà des clivages politiques. « Nous abordons là des thèmes transpartisans, il n’est plus question de gauche ou de droite sur ces sujets, mais bel et bien de solidarité féminine au-delà des lignes politiques et transgénérationnelles », explique ainsi Sophie Auconie, députée européenne UDI et marraine de l’événement.
« Notre intérêt commun : mener ensemble le combat contre le sexisme »
Ce que confirme Laurence Rossignol, sénatrice socialiste : « L’émancipation des femmes sera l’œuvre des femmes elles-mêmes, même si les hommes sont les bienvenus. Les femmes politiques doivent avoir conscience que leur intérêt commun c’est de mener ensemble le combat contre le sexisme : on vit la même chose, les mêmes barrières, la même misogynie ». Objectif de ces deux journées de forum : amorcer le développement d'une réelle solidarité féminine entre responsables politiques. « La solidarité n’est pas dans le tempérament des femmes, qui ont plus l’habitude de jouer des coudes en politique », observe Laurence Rossignol. « Il y a une grande solidarité masculine pour ce qui est de créer une concurrence entre les femmes, ironise quant à elle la sénatrice Chantal Jouanno. Et à l’inverse la solidarité féminine fonctionne assez peu. Quand l’une d’entre nous est attaquée de façon sexiste, c’est à chacune d’entre nous de réagir, indifféremment de nos bords politiques », défend-t-elle.
Quid des femmes et du leadership ?
Autre priorité : donner les clefs aux femmes pour progresser professionnellement. Outre les ateliers et workshops organisés lors du forum, les débats aident ainsi chacune des participantes à prendre conscience des leviers sur lesquels elles peuvent travailler. « Il se pose une réelle question des femmes et du leadership », constate Laurence Rossignol. « On rencontre encore trop peu de femmes qui veulent être chefs dans un milieu où je connais pourtant peu d’hommes qui se posent même la question », souligne-t-elle, pointant du doigt l’inhibition des femmes en politique. « Elles ne sont pas totalement certaines de la légitimité de leur place en politique et ont surtout l’impression de ne pas détenir tous les codes et toutes les clefs d’accès au pouvoir », analyse-t-elle. Sophie Auconie et Chantal Jouanno observent par ailleurs que la « politique est le dernier théâtre d’opérations guerrières du point de vue des hommes ». « On parle de bataille politique, d’adversaires, tout un vocabulaire très guerrier », soulignent-elles, faisant valoir que cette façon de voir les choses est très éloignée de la façon dont les femmes appréhendent la politique. Alors comment conjuguer le pouvoir politique au féminin ? Nombreuses sont les pistes d’innovation qui ont été abordées durant les débats. Interdire les réunions trop tardives ou bien proposer un mode de garde sur ces horaires pourrait être une solution à adopter. Imposer des moyens de coercition pour appliquer les nombreuses lois sur l’égalité hommes-femmes en est une autre. Tout comme le fait de recruter soi-même des femmes lorsque l’on atteint un poste à responsabilités. Mais toutes sont d’accord : « Les réseaux pour l’instant, c’est la force des hommes et notre faiblesse ». D’où la volonté commune de développer les alliances féminines dans le milieu politique. Et d’être des « femmes qui en ont », comme le résume en plaisantant Sophie Auconie.
< Précédent | Suivant > |
---|