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Quel agenda de développement après 2015?

Les Objectifs du Millénaire pour l’élimination des pires formes de pauvreté devraient être réalisés d’ici à la fin de 2015. On en est encore loin. La discussion bat cependant déjà son plein sur la suite à leur donner.

Le rapport de bilan 2012 de l’ONU (1) le montre une fois de plus : globalement, la plupart des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) ne seront pas atteints. La communauté des Etats n’est dans la cible que pour la réduction de moitié de la pauvreté monétaire la plus grave (merci la Chine !), de l’accès à l’eau potable et de l’égalité entre filles et garçons à l’école primaire. Elle est à mi-chemin pour la scolarisation élémentaire de tous les enfants.

En revanche, pour tous les autres objectifs, on est encore loin du résultat attendu. Les OMD, en particulier, n’ont que très peu conduit à des progrès locaux dans les Etats fragiles, en proie à la guerre ou à des conflits.
Cela dit, il serait faux de parler d’un échec pur et simple du concept des OMD. Nombre de pays, aussi africains, ont accompli des avancées considérables en matière de formation, de santé ou de réduction de la mortalité infantile ; ils ont pour cela obtenu d’importants moyens financiers. En même temps, sur plusieurs plans, les pays industrialisés n’ont pas rempli leurs devoirs. Seuls cinq des vingt-deux Etats de l’OCDE ont augmenté comme promis leur aide à 0,7% du revenu national brut. Aucun n’a mis en question les règles inéquitables des systèmes commercial et financier.

Conserver les forces

Les points forts des OMD devraient fonder le suivi qui est actuellement esquissé pour la période post-2015. C’est, entre autres, ce qu’exige l’UN Task Team (voir encadré) dans un rapport (2) au secrétaire général de l’ONU ainsi que les réseaux d’ONG Beyond 2015 (3) et Eurostep (4). Les trois soulignent que les OMD ont permis de focaliser la coopération au développement davantage sur la lutte contre la pauvreté et les objectifs sociaux. Ils ont donné une orientation commune aux différents acteurs. Le nombre réduit d’objectifs, leur formulation claire, leur mesurabilité ont rendu possible une large mobilisation politique.

Tirer les leçons des faiblesses

Les OMD ont toutefois aussi révélé des lacunes évidentes qu’il conviendra d’éviter à l’avenir. Ainsi, la large perspective de la Déclaration du Millénaire – fondée sur les droits humains – a été réduite à des objectifs sociaux politiquement inoffensifs et peu controversés. On a mis entre parenthèses la nécessité de réformes structurelles ainsi que des questions comme les inégalités sociales, la sauvegarde de l’environnement ou la prévention des conflits et de la violence. Les Objectifs ont fixé des résultats finaux, mais soigneusement esquivé les causes de la pauvreté et les politiques requises pour les surmonter. De plus, les OMD ont été élaborés sans une large consultation des gouvernements, de la société civile et des personnes concernées. Beaucoup de pays en développement les ont du coup perçus comme de nouvelles conditionnalités et se sont peu identifiés avec eux.

Nouvel agenda

Sur la base de ces constats, l’UN Task Team (2) et les deux réseaux d’ONG ont esquissé les premiers contours d’un agenda du développement post-2015. Ils attendent qu’il prenne en compte les crises sociales, économiques, alimentaires et écologiques actuelles. Il devrait viser « un monde équitable et durable, où les droits de tous les êtres humains sont respectés » (Beyond 2015). Il devrait concerner tous les Etats, mais en différenciant leurs responsabilités et leurs devoirs. A l’avenir, tous les pays sont tenus de briser le cercle vicieux de la croissance économique destructrice et d’élaborer des modèles de production et de consommation respectueux de l’environnement. Autrement dit, le paradigme de développement qui a prévalu jusqu’ici – fondé sur la charité (« le Nord aide le Sud ») – doit être remplacé par un engagement universel. Il convient de réduire la pauvreté et les inégalités – à l’intérieur et entre les nations – ainsi que de reconnaître les limites écologiques de la planète. Cela implique deux choses. D’une part, de corriger les déséquilibres de pouvoir et les privilèges des acteurs économiques et financiers transnationaux en faveur des droits publics et de processus de négociations démocratiques. D’autre part, de réévaluer le rôle et le devoir de rendre des comptes des gouvernements, premiers responsables du bien-être et des intérêts à long terme de leur population.

Elaboration participative

Concernant le processus, l’UN Task Team et les deux réseaux d’ONG proposent de s’accorder sur des principes fondamentaux avant de formuler des objectifs concrets. Le point de départ – en plus des Pactes des droits humains et de l’Agenda 21 adopté au Sommet de la Terre de 1992 – devrait être constitué par les principes contenus dans la Déclaration du Millénaire : droits humains pour tous, égalité sociale, respect de l’environnement, de la paix et de la sécurité. Ce cadre devrait assurer que les objectifs fixés ne se contredisent pas et qu’ils correspondent à tous les critères de la durabilité.

Des réseaux féministes exigent l’ancrage central de l’égalité entre les sexes et des droits reproductifs, car la discrimination persistante des femmes est l’un des principaux obstacles au développement. Finalement, il convient que le nouvel agenda du développement – contrairement aux OMD – soit élaboré de concert avec les autorités nationales et locales, la société civile, la science et avant tout les personnes touchées par la pauvreté. C’est une condition pour que les gouvernements et les populations s’identifient avec les objectifs à venir et s’engagent activement pour leur réalisation. Le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) prévoit des consultations dans quelque 100 pays. On ne sait pas encore cependant quelle sera leur étendue ni comment leurs résultats seront intégrés dans le nouvel agenda de développement global.

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La discussion en Suisse

ns    En Suisse, la Direction du développement et de la coopération (DDC) ainsi que l’Office fédéral de l’environnement (OFEV) ont initié des processus de consultation sur le nouvel agenda de développement et les objectifs de développement durable (Sustainable Development Goals, SDGs). Alliance Sud, qui y participe, va s’engager pour que le nouvel agenda repose sur une approche intégrale en matière de durabilité et de droits humains, et pour qu’il soit focalisé sur la justice sociale. Un accent particulier sera mis sur la cohérence : il importe que tous les domaines politiques (commerce, finance, environnement, politique sociale…) soient évalués à la lumière de leur compatibilité sociale et environnementale. Les débats futurs ne devront pas porter uniquement sur des listes d’objectifs individuels. Il s’agira davantage de réfléchir à une nouvelle conception du développement.

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Feuille de route

ph/ns    Le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon a, depuis décembre, chargé plusieurs instances de plancher sur un nouvel agenda du développement. Primo, coordonné par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et le Département des affaires économiques et sociales (UNDAES), l’UN Task Team post-2015 comprend quelques 50 agences et unités de l’ONU. Il a publié en juin un premier rapport. Secundo, un panel à haut niveau de personnalités doit élaborer jusqu’en mai 2013 des recommandations, « avec des responsabilités différenciées pour tous les pays et un accent prioritaire sur la lutte contre la pauvreté et le développement durable ». Ses propositions seront discutées par l’Assemblée générale en automne 2013. Tertio, un comité d’experts dirigé par Jeffrey D. Sachs, doit accompagner le processus d’une manière scientifique. Le but est que le nouvel agenda du développement soit sous toit en 2014, au plus tard en 2015.

Parallèlement, le Conférence Rio+20 a chargé l’Assemblée générale de l’ONU de septembre de créer un groupe de travail avec des représentant-e-s de 30 pays de toutes les régions du monde. Sa tâche sera, en l’espace d’une année, d’établir un catalogue complet d’objectifs de développement durable (Sustainable Development Goals, SDGs). Selon le document final de Rio, le processus sur les SDGs doit se dérouler en cohérence et coordination avec le processus post-2015. On n’a toutefois pas décidé comment et si les différents processus devaient converger dans un agenda commun.

Source : Alliance Sud

 

A travers cette section, le ROFAF aimerait informer son audience sur les différents processus en cours pour l’élaboration du nouveau cadre de développement pour l’Après 2015, les actions de mobilisation et de plaidoyer entreprises pour les droits des femmes ainsi que les différentes possibilités d’engagement qui existent encore. En savoir plus