Il est nécessaire de réfléchir à une nouvelle génération de leaders, capables de relever plusieurs défis comme ceux de la fragmentation de l’espace, de l’histoire et du savoir, de la refondation de l’Etat postcolonial, de la promotion de la démocratie et des droits humains, et de la mise en place de nouvelles conditions de paix et de liberté, gage d’un développement durable. C’est sur la manière d’affronter ces différents défis que se penche cette contribution.
« Les inconditionnels du continent feront l’Afrique. »
Cheikh Tidiane Gadio, ministre d’Etat, ministre des Affaires étrangères du Sénégal
1. Introduction
1Le concept de leadership tout comme celui de la société civile relèvent de la culture anglo-saxonne. Ces deux notions, actuellement à la mode, sont passées dans la tradition francophone seulement ces dernières années, à la suite de l’émergence de la démocratie après la fin des empires coloniaux et de l’affrontement Est-Ouest.
2Durant la longue période de la colonisation et de la Guerre froide, la démocratie a plutôt laissé place aux Etats forts comme expression du pouvoir. Ce sont les nouvelles libertés occasionnées par le triomphe de l’économie libérale qui ont fait resurgir le concept de leadership en Afrique comme élément déterminant d’une gestion rationnelle des hommes et de la chose publique. Les pays qui ont pu bénéficier d’un leadership éclairé ont connu un développement avancé, tandis que ceux qui n’en ont pas bénéficié croupissent dans la misère, victimes d’une mauvaise gestion des affaires de la cité. De ce point de vue, le cas de l’Afrique noire est particulièrement critique. C’est la raison pour laquelle, après cinquante années d’indépendance, on ne peut s’empêcher d’évoquer cette question de leadership ; de sa bonne compréhension dépendra en effet l’avenir du continent noir.
3La question du leadership a commencé à se poser à ce continent dans les années 1990, début de la démocratisation de l’Etat et de la société. La qualité des leaders est devenue un enjeu majeur dans la réussite et l’enracinement du processus démocratique.
4Pourtant, la problématique du leadership reste encore floue dans les mentalités africaines en raison des séquelles du colonialisme et du mimétisme qui en découle. Cette question est désormais liée à deux situations qui agitent les sociétés africaines contemporaines :
- l’avenir de l’Etat postcolonial, en raison des crises sociopolitiques récurrentes qui l’affectent et des difficultés des populations de se l’approprier ;
- la nécessité d’inventer un nouveau mode de gouvernance sans lequel le processus démocratique entamé depuis 1990 risque d’être compromis. On le voit déjà à travers le trucage répété des élections et le retour progressif des militaires au pouvoir.
5Ces deux situations imposent à l’Afrique noire la nécessité de faire émerger une nouvelle génération de leaders, capables d’entamer la refondation de l’Etat postcolonial en crise, capables aussi de mieux défendre les intérêts des populations, à partir du respect scrupuleux des différentes institutions étatiques. Ce respect des institutions est encore loin d’être un acquis à cause de plusieurs influences contradictoires qui s’exercent sur les responsables politiques africains. Parmi celles-ci, on peut mentionner la persistance de l’hégémonisme des grandes puissances et les enjeux économiques que représente l’Afrique en raison de ses principales ressources naturelles : pétrole, or, diamant, uranium, coltan, bois, etc. A cela s’ajoutent les pesanteurs socioculturelles.
6Pour aborder ces questions, cet article s’articule autour d’une approche historique du leadership africain (2), de la question des élites face aux exigences du monde contemporain (3) et de l’action des nouveaux leaders comme alternative au déficit de l’Etat, des droits humains et du capital social en Afrique (4).
Pour accéder à l'intégralité de l'article : http://poldev.revues.org/120#tocfrom2n5
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